Aux origines de ma Cuisine

La Cuisine est sans aucun doute un métier de passion. Une passion qui permet de passer au-delà de la dureté et de l’engagement que nécessite – dès le plus jeune âge – cette profession. Et il y a toujours un moment dans la vie d’un Cuisinier où cette interrogation se pose : comprendre d’où l’on vient pour savoir où l’on va ! Aujourd’hui j’aimerais vous présenter ceux qui ont éclairé mon parcours et qui ont construit, chacun à leur manière, l’identité de ma cuisine et bien au-delà.

On dit que si vous demandez à un Italien qui est le plus grand Chef du Monde, il vous répondra sans hésiter : Ma Mère. Alors si je devais revenir aux origines de la passion, c’est indéniablement à elle que je la dois. Une cuisine simple réalisée à partir de bons produits et surtout avec cette volonté constante de faire plaisir. Ce don de soi est un héritage qui ne m’a jamais quitté et que j’essaie de transmettre à mon équipe : cuisiner comme si c’était pour vos enfants, pour ceux que vous aimez ! Cette Cuisine vous la retrouverez d’ailleurs au Bistrot de la Madie où j’aime proposer des recettes simples, gourmandes autour d’une cuisson au feu de bois, une véritable Madeleine de Proust à mes yeux.

Plus tard, vint le moment des premiers stages en Cuisine qui n’ont fait que renforcer cette envie naissante d’être au fourneau. C’est au Chef Michel Canet du restaurant « Le Grand St Michel » à Alençon – il faut savoir qu’en Normandie, vous trouverez très souvent le terme St Michel dans l’appellation d‘un restaurant – que ma Mère m’a confié pour mes deux années d’apprentissage. Mon arrivée dans sa Cuisine et ses deux années – très dures – à ses côtés ont été une véritable prise de conscience et une confirmation pour moi dans ma volonté de devenir Cuisinier. Un chef au talent, au dévouement et à l’abnégation total pour ses clients qui a forcé le respect et l’admiration du garçon que j’étais. Sans compter l’enseignement très complet qu’il m’a transmis puisque tout était fait maison – du pain à la cueillette au Champignon – et surtout le soucis, l’amour du client. Je n’aurais pu rêver de meilleur Maître d’apprentissage car il a su traduire une passion en vocation et pour ça je ne pourrais jamais assez le remercier. C’est d’ailleurs à lui que je dois mon entrée à la Tour d’Argent à Paris suite à l’obtention de mon diplôme.

Ceci a été le point de départ d’une épopée Parisienne. Après la Tour d’Argent j’ai intégré le restaurant Lucas Carton sous la direction du Chef Frédéric Robert. C’est grâce à cette expérience que j’ai pu – après deux tentatives – intégrer ce que je considérais depuis quelques temps comme le Grall : les Cuisines Trois Étoiles de l’Ambroisie à Paris dirigées par le Chef Bernard Pacaud. Cette rencontre a été marquante dans ma vie de Cuisinier. Sur la manière d’appréhender les produits et sur la rigueur, le respect qu’il faut manifester lorsqu’on les travaille. Un lieu où, une fois encore, l’émotion du gourmet est à l’honneur. Comme le dit Bernard Pacaud lui-même : Ma meilleure cuisine, c’est celle que je fais pour ceux que j’aime !

Alors je vous dirais qu’au-delà de la passion pour la Cuisine, il y a sa transmission. La mémoire de ceux et celles qui ont partagé leurs valeurs au cours de mon apprentissage et bien après : l’amour des bons produits, le don de soi au client, la rigueur pour l’excellence. Ma cuisine voyage par affection parmi celles que l’on m’a légué et si les étoiles brillent au-dessus de La Villa Madie, c’est aussi grâce à eux.

Dimitri Droisneau